Conscience

Paris n'est libre que depuis quelques jours et une grande partie de la France est encore occupée, mais déjà s'atténue l'espoir cultivé par la résistance d'une presse nouvelle, purgée non seulement des tares de la collaboration (ça sera fait) mais aussi du mercantilisme d'avant-guerre.

L’un des plus éminents défenseurs de cet idéal est Albert Camus, qui avait appris son métier à Alger Républicain et au Soir Républicain avant d’en connaître la face populaire à Paris-Soir (dont il ne supporta pas longtemps l’« l’abject esprit de midinette [...] la   sentimentalité, le pittoresque, la complaisance […] »). Devenu rédacteur en chef de Combat, feuille de la résistance puis quotidien au grand jour, il poursuit éditorial après éditorial son combat pour un journalisme réflexif, scrupuleux, soucieux de l’édification de ses lecteurs et soumettant jusqu’à ses propres convictions à l’épreuve d’un doute systématique.

S’il reconnaît avec amertume des travers de jadis - crédulité, précipitation, superficialité - dans certains des journaux fraîchement reparus, du moins la vision d’un internet contemporain majoritairement tourné vers le divertissement et l'immédiateté lui aura-t-elle été épargnée. Ce qui est peut-être dommage, car si Camus a offert au journalisme certains de ses plus beaux et plus solides repères moraux, il n’a pas vraiment résolu en théorie (pas plus que Combat, dont les ventes chuteront rapidement, ne l'a résolu en pratique) l'impossible paradoxe du journalisme pris entre les tensions opposées de l'intérêt public et de ce qui intéresse le public.




 01-09-1944

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